Le recteur de Poitiers a décidé unilatéralement de proposer au Ministère de L'Education Nationale un projet de suppression de Classes Préparatoires aux Grandes Ecoles (CPGE),
diminuant ainsi d'une centaine de places l'offre de formation dans le Poitou-Charentes.
Les sections PCSI et Hypokhâgne du lycée Camille Guérin seront
toujours ouvertes, mais les places offertes seraient réduites de moitié.
C'est en réaction à ce projet excessif, qui se ferait, s'il était accepté,
au détriment de la population poitevine, que les enseignants et les élèves de CPGE du lycée Camille Guérin ont manifesté le mardi 2 décembre 2014 de leur lycée jusqu'au rectorat de Poitiers.
Moins d'une demi-heure après le début de la dispersion de la manifestation, le site de France3 publiait un article avec une photo de la manifestation et un texte visiblement préparé par le recteur pour tenter de miner l'effort de lutte contre son projet.
http://france3-regions.francetvinfo.fr/poitou-charentes/2014/12/02/poitiers-les-classes-prepa-de-camille-guerin-ne-veulent-dans-la-rue-604876.html
Ce texte est un exemple grossier de désinformation, truffé de mensonges éhontés, ainsi que de présentations extrêmement biaisées, que nous analysons ici :
- "réorganisation voulue par le rectorat". Il ne s'agit pas d'une réorganisation, mais d'une diminution nette de l'offre de formation locale pour les jeunes poitevins.
- "disparition de certaines classes préparatoires". Les sections PCSI et Hypokhâgne seront dans tous les cas toujours ouvertes à la rentrée 2015, c'est le nombre de places qui diminue.
- "au profit d'autres." La "compensation" proposée par le recteur n'en est pas une, le nombre de places correspondant à son "offre" s'élevant tout au plus à une vingtaine, contre une centaine supprimées.
- "Les classes préparatoires de la région manquent d'attractivité et leurs
résultats ne sont pas toujours satisfaisants. C'est le constat que fait
l'académie de Poitiers". Un bel exemple de phrase péremptoire, relayant la propagande du recteur. Le début de la phrase suivante ne rattrape pas grand chose, des guillemets auraient pour le moins été de mise.
- "en chiffrant à 500 le nombre de places vacantes
dans les classes préparatoires de Poitou-Charentes depuis 10 ans". Donnée fantaisiste, que ce soit en additionnant les places vacantes de chaque année (ce qui serait alors une sous-estimation), ou en comptant pour une seule année (ce qui serait alors une surestimation grossière).
- "Les sections "jugées les moins performantes et les moins attractives" seront réduites". Réduction drastique s'il en est, et critère d'évaluation basé sur des approximations et mensonges, voir ci-dessous.
- "pour permettre la création de filières réservées aux bacheliers professionnels ou technologiques". Mensonge éhonté, une seule filière est prévue par le projet, une section ATS, pour laquelle on peut s'attendre à une quinzaine ou une vingtaine de places effectives, vu la moyenne nationale. De plus, une telle section n'accueille pas des bacheliers, mais des élèves ayant un BTS. Cette filière constitue une passerelle pour ces élèves, et est donc en soit intéressante, mais les taux de réussite sont très faibles, et cette section peu "performante" si on suit les arguments du recteur.
- "toutes les filières existantes resteront accessibles dans l’académie de Poitiers". Ouf, enfin une information correcte, à ceci près qu'elles seront moins accessibles, une centaine de places disparaissant.
- "d'autres [classes] seront créées". Non, peut-être une, et de très faible effectif.
- "ou verront leur nombre d'élèves augmenter". Ce n'est pas le recteur qui décide de ça, ce sont les lycéens qui s'inscrivent sur APB, et donc il est malhonnête de présenter ceci comme l'élément d'un projet.
- "Dans le collimateur depuis déjà plusieurs mois". Deuxième information correcte, le recteur faisant une affaire personnelle de ce dossier.
- "les classes prépa ne font pas le plein comme en section scientifique". Mensonge. Cette année, la section PCSI a accueilli 84 élèves, sur une capacité maximale de 96. L'année précédente, il y a effectivement eu un creux dans le recrutement, mais cette baisse a été observée au niveau national, ainsi que la remontée cette année.
- "soit affichent des résultats médiocres comme en littéraire (aucun élève admissible dans une grande école en 2014)". Mensonge, mensonge, mensonge. Une quinzaine d'élèves de section littéraire ont intégré des Ecoles de Commerce, de Communication, ou des IEP l'année dernière. Nombre d'autres ne se destinent pas à ce type d'études et prolongent leurs études littéraires brillamment.
- "Elèves et enseignants []
craignent la suppression pure et simple [de la section] hypokhâgne dès l'an prochain". Affabulation. Cette crainte n'a été exprimée par aucun enseignant ou élève du lycée, qui ne craignent pas la suppression de la section, mais tout simplement la réduction des places proposées aux jeunes poitevins.
- "En parallèle, d'autres filières vont voir le jour ou renaître comme la section PTSI ( Physique, technologie et sciences pour l'ingénieur) du lycée Louis Armand". Certains n'ont pas peur du ridicule! La section PTSI-PT du lycée Louis Armand existe déjà! Une vérification prend 5 secondes sur Google.
- "une section Economie et Commerce, option Technologie (ECT) apparaîtra au lycée de la Venise Verte, à Niort". Again!
- "une filière d’Adaptation pour les techniciens supérieurs (ATS) du tertiaire ouvrira". Déjà commenté.
- "ouverture, en 2014, de la classe préparatoire à vocation économique de Saint-Exupéry, à La Rochelle ". Ce dernier intitulé ne correspond à aucune formation de l'Education Nationale, de quoi parle-t-on? Comment peut-on parler d'ouverture en 2014 quand les postes d'enseignant ne sont pas prévus?
- "le recteur de Poitiers vise à augmenter le nombre de places accessibles
aux bacheliers des séries technologiques et professionnels (308 en 2016
contre 214 en 2013)" Chiffres gonflés. Vu le contexte des classes voisines de celles proposées et les moyennes d'effectifs au niveau national, on peut compter tout au plus sur une quarantaine de places, et encore une fois pas en 2014.
- "favoriser ainsi les milieux modestes". Les PCSI et Hypokhâgne du lycée Camille Guérin accueillent actuellement plus de 45% de boursiers, et la diminution du nombre de places risque bien de concerner 100% de boursiers. De plus, ces classes fournissent une formation qui débouche dans l'immense majorité des cas sur des études supérieures réussies, un très faible taux de chômage et des emplois de haute qualification, pour des élèves en grande partie issus de "milieux modestes".
Dans la foulée,
7 à Poitiers, dont un des journalistes est récemment devenu conseiller en communication du recteur, publie :
http://www.7apoitiers.fr/depeche/4217/poitiers-la-colere-des-classes-prepas
"Dans cet établissement, "
malgré un bon taux de remplissage (80%), on
relève 30% d'abandons en cours de cursus, 75% de réorientation vers
l'université à la fin des deux ans et aucun élève admissible dans une
grande école en 2014"."
On atteint ici des
sommets de désinformation :
- toutes les filières CPGE du lycée intègrent des élèves en Grande Ecole (c'est-à-dire des élèves admis, sans parler d'admissibles), avec un taux global proche des 70%, variable suivant les filières.
- Le taux d'abandon global en cours de cursus s'élève à moins de 10%.
- La réorientation en université ne concerne qu'une minorité d'élèves, et les enseignants de l'Université se félicitent des élèves admis en L3 après leur passage en CPGE.
